Non résidents et prélèvements sociaux : L’affiliation à un régime social étranger doit être prouvée

Le contentieux du paiement ou non des prélèvements sociaux (CSG et CRDS) par les non-résidents, qui a commencé il y a plus de dix ans, n’est toujours pas terminé. Un arrêt de la Cour administrative d'appel de Versailles du 8 septembre 2022 vient de le démontrer.

Il est rappelé que la seconde loi de finances rectificative pour 2012 a étendu les prélèvements sociaux (CSG et CRDS) aux revenus fonciers et aux plus-values immobilières de source française perçus par des personnes physiques fiscalement domiciliées hors de France.

Des parlementaires avaient pourtant alerté le Gouvernement sur le fait que cette disposition était contraire aux règles européennes. Ce qui devait arriver arriva. Dans un arrêt du 26 février 2015 (Affaire « de Ruyter »), la Cour de justice de l’Union européenne a jugé que les revenus du patrimoine des résidents français, travaillant dans un autre Etat membre, ne pouvaient pas être soumis aux contributions sociales françaises. Le Conseil d’Etat, dans un arrêt du 27 juillet 2015, a fait sienne la position de la juridiction européenne.

Aux termes de ces décisions, une personne relevant d’un régime de sécurité sociale d’un Etat membre de l’Union européenne, autre que la France, ne pouvait pas être soumise aux prélèvements sociaux sur ses revenus du patrimoine (revenus fonciers et plus-values immobilières).

Ne voulant pas s’avouer vaincu, le Gouvernement français est parvenu, par un artifice juridique, à travers la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016, à assujettir à nouveau, à compter du 1er janvier 2016, aux prélèvements sociaux, les revenus du patrimoine et les revenus de placement des contribuables résidents dans un Etat de l’Union européenne ou dans un Etat tiers à celle-ci.

Toutefois, cet assujettissement a définitivement pris fin le 31 décembre 2018, la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2019 exonérant de prélèvements sociaux les revenus du patrimoine et les revenus de placement des personnes qui ne relèvent pas du régime obligatoire français de Sécurité sociale, mais qui relèvent du régime obligatoire de sécurité sociale d’un autre état membre de l’Union européenne, de l’Espace économique européen ou de la Suisse.

Toutefois, pour bénéficier de cette exonération, il est essentiel de prouver, sans équivoque, que l’on dépend bien d’un tel régime de Sécurité sociale étranger. Une contribuable vient de l’apprendre à ses dépens.

Résident en Espagne, elle a perçu en 2015 des revenus fonciers provenant de la location de biens immobiliers situés en France, qui ont été soumis aux prélèvements sociaux. Elle a saisi le Tribunal administratif de Montreuil – compétent pour connaître des litiges des non résidents - pour obtenir la décharge des impositions acquittées à tort selon elle. Le Tribunal ayant rejeté sa demande dans un jugement du 4 février 2020, elle a saisi la Cour administrative d’appel de Versailles.

Pour justifier sa demande, elle a fait valoir, en produisant une attestation, qu’elle était affiliée au régime de Sécurité sociale espagnol et que l’administration fiscale avait fait droit à sa demande, pour les années précédentes, au vu de la même attestation.

Pourtant, la Cour administrative d’appel de Versailles, dans un arrêt n°20VE0185 du 8 septembre 2022, a rejeté sa demande.

Pour justifier ce rejet, la Cour a relevé que la contribuable ne démontrait pas avoir bénéficié d’une affiliation au régime de Sécurité sociale espagnol « pendant la période contestée du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2015, en se bornant à produire, comme en première instance, une attestation de la Sécurité sociale locale, datée du 30 novembre 2016, au demeurant en langue espagnole, qui ne mentionne aucune période d’affiliation. »